Le flex desk est-il la solution idéale pour mon organisation ?

Passer en mode flex desk est aujourd’hui une question incontournable pour la plupart des projets immobiliers. « Flex desk » ou « desk sharing », principe selon lequel le collaborateur n’a pas de poste fixe affecté dans l’espace de travail est l’étape la plus avancée dans l’optimisation des espaces et la refonte de l’organisation temps – lieu – rapport au travail, individuel et collectif.

Un projet de réaménagement des espaces a généralement plusieurs objectifs, plus ou moins affichés. L’un de ces objectifs est la réduction des espaces de travail afin de générer une économie d’un point de vue foncier, en rapprochant les équipes et/ou en les installant dans des superficies plus réduites qu’auparavant. C’est pour beaucoup de Directions Immobilières, un indicateur de performance du projet de déménagement / réaménagement des espaces qui a été pendant longtemps le premier indicateur recevable et celui sur lequel la réussite et la pertinence du projet étaient mesurées par leur Direction générale.

La 1ère étape de cette optimisation des espaces a été l’introduction des espaces ouverts, « open space », dont les bienfaits et les inconvénients ont déjà été largement traités et analysés.

Le Flex desk va un cran plus loin. Au-delà de l’espace ouvert, c’est la notion même d’espace attribué au collaborateur qui est mis dans la balance. La logique suivie est qu’une part représentative des effectifs n’est pas présente dans les locaux de l’entreprise et revient à payer / louer un espace pour rien : des collaborateurs en déplacement, nomades par définition (commerciaux, consultants, …), en absence maladie ou en congés,…
De ce constat, il est alors retenu la logique de capacités d’accueil qui se limiteraient à 70 ou 80% des effectifs pressentis à fréquenter le site.

La question est donc de définir au sein de l’organisation les modes de travail, les métiers, les situations qui sont propices à voir son poste de travail localisé dans un espace différent chaque jour, en fonction de sa fréquentation du site, de l’heure à laquelle le collaborateur arrive, … de la disponibilité des locaux au jour le jour.

Le collaborateur qui manifestement se rend sur son lieu de travail chaque jour et qui occupe non pas un mais plusieurs écrans de PC fixe pour réaliser son activité, ne sera manifestement pas le meilleur candidat au Flex desk. Inversement le collaborateur en mode projet ou en intervention extérieure sur une grande partie de son agenda, sera vraisemblablement plus disposé à changer de poste dans l’espace ouvert, au gré de ses réunions, des activités à effectuer, de l’actualité de ses missions.

Le Flex Desk n’est pas un choix pensé indépendamment d’une réflexion élargie sur ce que doivent être les meilleures dispositions pour travailler. Ainsi la notion de Flex desk appelle à réfléchir et à accompagner d’autres modalités d’organisation comme le télétravail, le tiers lieux, et tous les dérivés d’organisation du lieu de travail déporté sur un autre site que celui du poste de travail attribué.

Le Flex Desk se veut flexible en ce sens qu’il amène à ne plus poser de question de territorialité dans la manière dont certains collaborateurs conçoivent leurs espaces individuels. Il rompt aussi avec le schéma selon lequel le bureau est une prolongation de la sphère privée. Rien n’empêche le collaborateur de poser le cadre avec la photo de famille, sauf que cela devient contraignant de le ramener tous les soirs chez soi. Le garde-manger personnel caché dans l’armoire fait aussi les frais de la dépersonnalisation de l’espace, alors que l’usage de bouilloires individuelles est moins toléré pour favoriser la fréquentation des espaces partagés de détente.

Par ailleurs, le collaborateur n’a plus aujourd’hui accès à un niveau de technologie supérieur au sein de l’entreprise, au regard de ce qu’il possède comme équipement à son domicile. Ce constat n’était pas vrai il y a encore quelques années. Mais de fait, le poste de travail n’a plus vocation à mettre à disposition un poste de téléphone fixe alors que le salarié cumule deux smartphones, le sien et celui prêté par l’entreprise. L’impression papier est quant à elle réduite par les initiatives de zéro papier. Tout concorde à ce que le collaborateur ne s’installe que temporairement et pour brancher un matériel qu’il emportera avec lui en fin de journée. Moins de 10% des collaborateurs sollicitent encore le poste fixe si l’entreprise leur propose une flotte de smartphone performants. Les quelques initiatives favorisant le stockage comme les casiers individuels ne sont pas nécessairement plébiscités, notamment si la réservation du casier ne peut dépasser la journée.

Le Flex Desk amène à réfléchir au lien qui existe entre performance et lieu de performance, visant à dissocier la performance de toutes conditions matérielles et logistiques superflues et d’un état d’esprit qui conclurait que travailler ou réaliser une activité intellectuelle ne peut se faire que dans le cadre d’un bureau ou d’un espace réservé, dans un temps donné, avec des dispositions précises.

Dissocier la performance d’une condition matérielle se concrétise par de nombreux exemples. En extrapolant, l’idée n’est pas si récente et trouve de nombreuses autres applications. C’est le cas par exemple de la méthode Agile bien connue des équipes informatiques qui cherchent à la mettre en place dont l’une des mesures les plus iconiques est de réaliser des réunions de courte durée en position debout / avec recommandation de ne pas s’asseoir. On associe à la productivité de la réunion, la posture (spatiale) des participants, faisant un lien entre la durée et la qualité de la réunion et le fait que s’asseoir et se mettre dans une situation physiquement plus confortable peuvent nuire à la performance de la réunion.

Parmi les facteurs de succès de mise en place du Flex Desk, l’entreprise doit se mettre en capacité de :

  • Mettre en place des règles de vie commune appréciées et partagées par les collaborateurs sur comment se comporter dans les espaces communs, les règles de savoir-vivre (hygiène, silence, …) à respecter et la « clean desk policy » qui permet à l’utilisateur du bureau laissé en Flex, d’en prendre possession sans avoir à repousser sur le côté les impressions, le courrier, les revues … qui ne le concernent pas, ou à faire le ménage du plan de travail…
  • Identifier quelles sont les équipes les plus à même de montrer l’exemple, de s’approprier le principe du desk sharing et d’en valoriser ce que cela rapporte, pour espérer créer l’engouement auprès des autres équipes
  • Identifier ce qui plait tant à certains irréductibles dans l’idée d’un poste de travail attribué en permanence (l’espace fermé, la proximité avec la fenêtre, la lumière, la proximité avec la sortie, l’armoire, la confidentialité…) et démontrer en quoi le mobilier et l’aménagement n’est pas un frein à certains avantages à défaut de proposer des privilèges,
  • Identifier toutes les stratégies d’évitement ou de comment le collaborateur, derrière une bonne volonté affichée de passer en Flex, essaiera tranquillement mais sciemment de reconstituer son espace individuel : en laissant trainer ses documents sur le plan de travail pour décourager quiconque de chercher à s’installer derrière, de reconstituer des cloisons en complétant la plante verte d’une pile de dossier, du kakémono du dernier événementiel marketing client, …
  • Inciter le manager à faire profiter son équipe de son bureau individuel en son absence, s’il possède encore lui-même ce bureau.
  • Inciter la Direction générale à passer en bureaux ouverts.

Ce dernier point n’est plus un tabou ou une question au sein de certaines organisations. Parmi les avantages retenus par les décideurs d’être en proximité immédiate des équipes, revient le rapport au temps. Un dirigeant auparavant libre de déraper sur son agenda ou de ne pas y prêter une attention constante, sera en espace ouvert, confronté à la même situation que tout collaborateur attendu par ses pairs quelques mètres plus loin pour une réunion, et devra se hâter. De même, on ne fait pas patienter trop longtemps un collaborateur qui est venu jusqu’à vous, alors qu’il n’y a plus de bureau fermé pour le faire patienter quelques minutes derrière la cloison. L’espace ouvert met l’ensemble des collaborateurs sur un pied d’égalité, il favorise la transparence et la fluidité dans les échanges. Le principe est d’autant plus accepté qu’il est porté par le haut de la hiérarchie.

La confidentialité des échanges n’est pas considérée davantage comme un obstacle à l’espace ouvert. Certaines pratiques ou activités nécessitent simplement d’avoir recours à une salle de réunion ou de passage, sans contrarier les esprits ou soulever des situations anxiogènes, à partir du moment où passer d’un poste de travail en espace ouvert à un espace partagé est une gymnastique quotidienne.

 Au-delà du respect de certaines normes réglementaires auxquelles l’entreprise doit se conformer quand elle conçoit ses ratios d’occupation, il est question de savoir comment les collaborateurs vont s’épanouir dans ces nouveaux espaces. Les normes imposées sont indicatives, parfois énoncées depuis de nombreuses années et donc, pas nécessairement en mesure d’objectiver les perceptions individuelles par définition très subjectives. La notion d’ambiance, d’environnement est pensée et réfléchie par les space planners et les concepteurs de mobiliers. Le ressenti, l’expérience et l’appropriation de l’espace vital relève de la perception de chacun. Un même espace peut engendrer des réactions et un a priori différents d’un utilisateur à l’autre. Tout l’art de la conception d’espace vise à satisfaire le plus grand nombre, en proposant des prestations adaptées en travaillant sur l’acoustique, la lumière, les flux de passage.

Les entreprises s’offrent aujourd’hui un niveau de modernité et de qualité dans le mobilier qui renvoie les bureaux individuels, les espaces fermés, les décorations et équipements anciens à des images d’un autre temps. La qualité des prestations, du mobilier vont toujours dans le sens de plus de confort et de modernité. Les entreprises qui n’ont pas encore entamé leur « montée de gamme », n’ont aujourd’hui plus de motif valable pour trainer : le coût d’acquisition du mobilier d’entreprise a été réduit par cinq sur les dix dernières années, pour des équipements toujours plus pointus, des matériaux toujours plus élaborés et une qualité d’ensemble inégalée.

Le seul  vecteur de confort sur lequel le space planning et le mobilier ont peu de levier, reste la surface utilisable nette des locaux. La conception peut être remarquable, le mobilier et les prestations de 1er choix … il arrive toujours un  moment où on ne peut pas pousser les murs. On en revient à la notion d’espace et au nombre de m2 auquel l’entreprise aura consenti dans son choix de site. Plus que la qualité du contenant et un niveau de qualité de prestation qui sera dans le futur comparable partout, c’est l’espace utilisable qui reste le premier indicateur de confort. En attendant que la qualité des aménagements des années 2010 soit perçue comme datée et représentatif d’une époque (comme l’était en son temps la tapisserie et la machine à écrire de la salle du conseil des années 70 !), ce qui différencie deux aménagements comparables reste bel et bien la notion d’espace qui s’en dégage. Et sur ce sujet, toutes les entreprises ne sont pas aujourd’hui dans les mêmes dispositions et en capacité d’offrir le précieux espace qui aère, libère les flux et les esprits …

Auteur : Marc GODARD – Manager

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