Prélèvement à la source, crédit d‘impôt, réduction d’impôt : quels impacts pour les salariés ? avec @actuEL_RH

Le prélèvement à la source de l’impôt sur les revenus du travail est sur les rails. Il devrait, sauf surprise de dernier instant, s’appliquer dès le 1er janvier 2018. Jean-Christophe Procot, senior manager au sein du cabinet conseil Wavestone, revient, à travers une série de chroniques diffusées par ActuEL-RH, sur les conséquences pratiques de cette réforme pour les services RH.

Depuis de longs mois, l’année 2017 a été présentée comme une année blanche. Dans l’esprit de beaucoup d’acteurs du monde de l’entreprise, ces déclarations ont fait naître la perception d’une réforme simple sans changement majeur à appréhender. L’évaluation préalable de l’article 38 du projet de loi de finance pour 2017 (une étude de plus de 400 pages) a permis d’identifier de premières orientations techniques. Il semble temps aujourd’hui important de poser un regard pragmatique et éclairé sur le sujet.

Si l’approche technique (pour ne pas dire technologique) du sujet est importante, nous ne devons pas pour autant ignorer les changements que vivront les salariés et donc les conséquences induites pour les employeurs.

Le nouveau schéma de flux va apporter un certain nombre de changements pour les contribuables. Et ces changements nécessiteront de la part des entreprises une organisation adaptée en terme de :

  • SIRH : les paies devront être correctes et sécurisées ;
  • Montée en compétence des équipes : il est illusoire de croire que l’entreprise ne sera qu’un point de collecte à destination de l’administration fiscale. Le personnel en charge des relations sociales devra nécessairement affronter les questions relatives aux modifications constatées par les salariés entre les situations pré et post réforme ;
  • Communication et information des salariés : dans un certain nombre de cas, il conviendra d’adresser des bonnes pratiques aux salariés afin de les éclairer dans cette nouvelle relation tripartite contribuable/salarié – entreprise – administration fiscale.

 

Flux de trésorerie

Le premier point que nous voulons soulever ici, et qui n’est en définitive que très partiellement évoqué sur le sujet, est celui des flux de trésorerie pour les salariés. Et il s’agit sans doute d’un des points les plus importants dans la relation pécuniaire qu’ils entretiennent avec leur employeur.

Souvenons-nous entre autre de l’impact de la « re-fiscalisation » des heures supplémentaires ou de l’intégration de la participation employeur à la couverture frais de santé dans le net imposable. Ce n’était là qu’un cas simple en matière de mise en conformité du SIRH, de la communication interne et de la montée en compétence des services paie.

Même si nous sommes tous égaux devant l’impôt, force est de constater qu’en termes de trésorerie, l’année 2018 risque de réserver un certain nombre de surprises, même pour les cas les plus simples.

Pour illustrer ces propos, voici une démonstration simple et directe de la nouvelle mécanique proposée. Prenons un cas relativement commun, celui de salariés vivant en couple et déclarant 75 000 € de revenus annuels au fisc. Ils ont un enfant et déclarent par ailleurs 6 000 € d’intérêts d’emprunts contractés pour l’acquisition ou la construction de l’habitation principale (soit 500 € par mois) et 4 800 € de frais de garde des enfants de moins de six ans au 1er janvier 2016 (soit en moyenne 400 € par mois).

Toutes choses égales par ailleurs, ce couple ne déclarant pas d‘autres revenus, ni d’autres charges, paiera donc 5,76 % d’impôt une fois pris en compte le bénéfice des divers crédits. Pour information, le taux d’imposition de ce foyer fiscal sans prise en compte de ces crédits d’impôt serait de 11,02 % (soit près du double).

Dans le cadre du système actuel de paiement de l’impôt, ce couple mensualisé doit s’acquitter de 10 prélèvements (de janvier à octobre), d’un montant mensuel de 388,70 €.

Les changements induits

La réforme va entraîner un certain nombre de changements.

Toutes choses égales par ailleurs :

  • Le nombre de prélèvements passera de 10 à 12 (si le salarié travaille 12 mois, un prélèvement sera réalisé sur chaque mois de paie) : nous aurons donc un impact direct sur la trésorerie du salarié ;
  • Le taux utilisé chaque mois pour le précompte de l’impôt ne sera pas le taux intégrant les crédits d’impôts (5,76%), mais un taux établi à partir du taux d’imposition sans prise en compte de ces avantages fiscaux (11,02 %), lui-même abattu de 10% au titre de la déduction forfaitaire pour frais professionnels : il faudra donc expliquer ce nouveau taux au salarié ;
  • Les flux de paiement passeront de un (administration fiscale) à deux (entreprise sur la paie + administration fiscale). Autrement dit, le paiement de la somme mensualisée de la part du salarié se substituera à deux opérations : le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu sur le bulletin de paie et le remboursement à l’administration fiscale directement auprès des salariés des divers crédits d’impôts ;
  • Le nombre d’interlocuteurs passera de un (administration fiscale) à deux (entreprise + administration fiscale).

Pour cette situation globalement assez simple, et dans le cadre d’une situation à revenus et composition du foyer fiscal inchangés pour le couple de salariés, l’évolution en termes de trésorerie se caractérisera par le passage :

  • D’une trésorerie linéaire imputée de 388,70 € par mois pendant 10 mois ;
  • A une situation plus complexe, avec des écarts de trésorerie en sa défaveur pouvant aller jusqu’à 231 € par mois.

Nous voyons donc que même dans les cas les plus simples, le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu génèrera un certain nombre de ruptures dans les habitudes des contribuables.

La réforme que nous allons connaître nécessite bien de valider, vérifier, communiquer, expliquer les diverses situations ayant un impact sur le montant de l’impôt. Les rôles, devoirs et obligations de chaque partie devront clairement être établis afin de faciliter au mieux cette transition.

Nous remercions ActuEL RH, Journal en ligne des Editions Législatives, pour la diffusion de cet article, que vous pouvez retrouver sur leur site ou leur compte Twitter.

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