Baisser la masse salariale pour réduire les coûts : une solution de dernier recours ?

« En période de crise économique […], les entreprises tentent par tous les moyens de réduire leurs coûts, sur tous les postes budgétaires. Le plus sensible et médiatique est celui de la masse salariale, avec, comme ultime mesure, le licenciement de salariés »

Cette phrase extraite du journal l’Express décrit parfaitement la ligne directrice de cet article : oui la réduction de la masse salariale par le licenciement de salariés ne devrait être que la solution de dernier recours des entreprises.

Plus facile à dire qu’à faire me diriez-vous. Une crise économique grave, provoquée aujourd’hui par une crise sanitaire, peut conduire à ces méthodes brutales pour l’emploi et pour la santé des salariés.

Mais d’autres solutions existent et peuvent être envisagées, toujours dans une logique de performance de l’entreprise, mais en se souciant davantage des salariés.

 

Réduire la masse salariale pour réduire les coûts au nom de la performance et la viabilité de l’entreprise

Avant toute chose, il nous semble important de rappeler ce que désigne la « masse salariale ». Nous opterons en premier lieu pour la définition utilisée par les experts comptables à savoir la somme des salaires bruts, des primes, des heures supplémentaires, des charges patronales et enfin des provisions de congés payés.      

Nous pourrions bien entendu également étendre notre vision aux accessoires de rémunération (transport, restauration, hébergements, …), à la protection sociale (mutuelle, prévoyance, retraite) ou encore à l’épargne salariale (intéressement, participation).

Sans surprise, la masse salariale est plus souvent le poste de coût le plus important pour une entreprise, pouvant monter jusqu’à 80% pour certaines entreprises dans le tertiaire.       
Réduire la masse salariale est donc un moyen efficace de réduire les coûts et ainsi améliorer la performance et la rentabilité de l’entreprise.

 

Réduction de la masse salariale : 2 méthodes, 2 visions

Il semble nécessaire de différencier la réduction de la masse salariale à travers le levier de la suppression d’emplois.

La méthode plus radicale, comme nous l’avons vu, implique une réduction des effectifs. Nous pouvons lister 3 façons de réduire les effectifs, par ordre croissant de conséquences pour l’emploi et les risques psychosociaux :

  • L’intensification du travail, résultant du départ de contrats à durée déterminée comme les CDD ou les stages
  • Les plans de départs volontaires
  • Les « Plans de Sauvegarde de l’Emploi » plus communément appelés plans sociaux ou licenciements économiques

Si la réduction des effectifs semble parfois inévitable, les licenciements économiques apparaissent néanmoins comme les plus brutaux pour la santé des salariés et les risques psychosociaux engendrés.

La psychiatre Elizabeth Kübler-Ross a notamment retranscrit à travers « la courbe du deuil » la réaction des personnes à la suite d’une annonce violente et douloureuse :

Parmi les risques psychosociaux identifiés sur les personnes licenciées, nous pouvons en lister plusieurs : « déprime, dépression, anxiété, détresse psychologique, stress et maladies associées », comme indiqué dans la courbe du deuil.

De plus, il ne faut pas omettre les salariés maintenus à leur poste, « les rescapés » qui doivent « trouver leur place dans la nouvelle structure, facteur de stress évident, renforcé par la crainte de faire partie des prochains départs en cas d’échec ».

 

Dans une autre vision, il est possible de réduire la masse salariale sans nécessairement réduire le nombre de postes. La réduction des coûts se retranscrit dans une limitation voire une baisse des salaires. Nous pouvons lister quelques-unes de ces mesures :

  • Imposer des prises de congés
  • Activité partielle
  • Modulation des bonus ou des primes
  • Gel des salaires
  • Baisse collective des salaires
  • Ajustement des garanties en termes de protection sociale

Les conséquences pour les salariés ne sont évidemment pas neutres et impactent indéniablement leur pouvoir d’achat. Mais ces solutions apparaissent moins brutales pour la santé des collaborateurs et génèrent moins de coûts cachés comme la démotivation et un stress accru.
L’entreprise devra évidemment communiquer sur ces mesures, expliquer les raisons de ces choix et répondre aux différentes questions légitimes qui en résulteraient.

 

Réduire les coûts sans réduire la masse salariale, solution de premier recours ?

En effet, des leviers d’économies allant dans ce sens existent et peuvent jouer un rôle important. Nous pouvons en citer deux, communs à toutes les entreprises : les frais généraux et les coûts de l’absentéisme.           
Les frais généraux comprennent notamment les frais de loyer, de fonctionnement (électricité, gaz, chauffage…) et les fournitures. « Ils peuvent représenter 15 à 25% du chiffre d’affaires d’une entreprise », somme non négligeable avec un coût social bien plus faible qu’une réduction de la masse salariale.  
L’absentéisme est un coût réel pour l’entreprise, coût qui pourrait être limité en améliorant notamment l’organisation interne et les modes de fonctionnement de l’entreprise. Ces améliorations, s’attaquant aux causes réelles, peuvent se matérialiser par une meilleure communication, une meilleure politique RH, une prise en compte plus accrue de la charge et des conditions de travail mais aussi par un management plus à l’écoute et bienveillant.

En synthèse, la réduction de la masse salariale est un puissant levier d’économie car il concerne le premier poste de dépense d’une entreprise. Mais il apparaît primordial de ne pas oublier les conséquences sociales de ces décisions, notamment si elles entraînent une réduction des effectifs symbolisée dans le cas le plus brutal par des licenciements économiques. La baisse de la masse salariale par la réduction des postes devrait être choisie comme la solution de dernier recours car d’autres méthodes existent. De plus, d’autres postes de dépenses peuvent être pris en compte pour améliorer la performance de l’entreprise sans que les salariés payent à chaque fois les pots cassés, d’autant plus lorsque cette baisse d’activité résulte d’une situation temporaire.

 

Sources :

L’Express – Comment les entreprises réduisent la masse salariale

Stimulus – PSE et restructurations : quels impacts pour la santé des salariés et la performance de l’entreprise

Legalstart – Coronavirus : comment réduire les coûts d’une entreprise

Movae – Réduire l’absentéisme au travail : quelles solutions ? 

—–Julian FERRASSONConsultant
Pour en savoir plus, vous pouvez contacter :
Jean-Christophe PROCOTSenior Manager
jean-christophe.procot@wavestone.com

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Back to top