Les réformes formation Macron : quelles transformations pour les entreprises et les salariés ?

Résister ou dépasser l’obsolescence des compétences ? Telle est la question au cœur du marché du travail – des compétences « d’actualité », c’est l’employabilité garantie. Alors que dans les années 80, la durée de vie d’une compétence était en moyenne de 35 ans, aujourd’hui celle-ci est de moins de 5 ans[1]. Comme pour entériner ce chiffre, on lit aussi que les métiers de demain n’existent pas encore (85 % des métiers de 2030 n’existent pas encore [2]).  Pour faire face à ces constats alarmants les réformes formation du projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » ont été votées en août 2018, afin d’aider les entreprises à maintenir les compétences et l’emploi.

Le projet de loi n°904 propose de nouvelles solutions en faisant évoluer le cadre légal de la formation professionnelle pour toutes les populations actives (salariés / indépendants / chômeurs). L’enjeu de ces réformes est double : la personnalisation et la libéralisation des formations. De surcroît, ces réformes supposent des changements notoires pour les entreprises et pour les salariés.  

 

Une nouvelle organisation et un nouveau système de financement de la formation pour les entreprises et les salariés

Le projet de loi n°904 introduit cinq grandes évolutions pour les entreprises et les salariés :

  • La conversion du Compte Personnel de Formation en euros

Si auparavant le Compte Personnel de Formation (CPF) était crédité au maximum de 24 heures par an, il dispose désormais d’un budget de 500 € par actif (800 € pour les personnes sans qualifications), dont le plafond est de 5000 € sur 10 ans. Cette enveloppe globale représentera 2 millions d’euros. Un investissement de taille qui soutient ainsi l’individualisation de la formation.

  • Le CPF devient un service dématérialisé et accessible par application mobile

En plus de disposer d’un budget individuel de formation, le salarié aura également accès à son CPF via une application mobile qui sera mise en ligne dès la rentrée 2019. A terme, cette application a pour vocation de permettre aux salariés :

  • D’accéder à un panel de formations certifiées par un organisme accrédité par la nouvelle Agence France Compétences – une instance gérée par l’Etat, les partenaires sociaux et les régions (fusion de la COPANEF, CNEFOP et FSPP).
  • De choisir ses formations directement sans besoin préalable de consulter son employeur – il/elle devra tout de même informer son entreprise au moins 2 mois avant le début de la formation, si elle a lieu sur son temps de travail.
  • De régler directement le paiement aux prestataires de formation à partir de l’application.


Ces nouvelles fonctionnalités ont fait émerger de nombreux débats (ex : risques de fraude), face auxquels, le gouvernement apporte deux gardes fous :

  1. La certification obligatoire des prestataires de formation, répertoriés dans un référentiel national
  2. La possibilité pour le salarié de demander une aide directe du Conseil en Evolution Professionnelle (CEP) jusqu’alors assez méconnue.
  • La simplification des circuits de financement

Pour les entreprises, les réformes formation apportent des changements dans leur système de financement de la formation. Désormais, elles devront verser leur cotisation[3] à l’URSSAF plutôt qu’à l’OPCA : l’organisation des versements est ainsi simplifiée et ne passera plus que par un seul circuit de financement. Toutefois, les fonds collectés seront réservés en priorité aux TPE/PME de moins de 50 salariés[4].

  • Les OPCA deviennent des OPCO

Désormais, ce sera l’URSSAF qui récoltera ces financements plutôt que les OPCA[5].  En ce sens, les Organismes Paritaires Collecteurs Agréés changent d’objectifs et de nom pour devenir des OPCO – Opérateurs de Compétences. Ces nouveaux organismes réunissent les fonctions de :

  • Financement de l’apprentissage
  • Co-construction des certifications de branches
  • Contrôle qualité des organismes de formations sous la direction de la future Agence France Compétence


Ainsi, les OPCO deviennent les interlocuteurs uniques des entreprises pour la gestion du plan d’adaptation et de développement des compétences.

  • Une définition plus large de l’Action de Formation

Le projet de loi n°904 renomme le plan de formation en « Plan d’Adaptation et de Développement des Compétences » et décide d’élargir la définition de l’action de formation : « [c’est un] processus pédagogique permettant l’atteinte d’un objectif professionnel. Elle fait l’objet de modalités d’apprentissage identifiées pouvant comprendre des séquences de positionnement pédagogique, de formation et d’accompagnement de la personne qui suit l’action, dont les acquis sont évalués. Elle peut être réalisée en tout ou partie à distance et en situation de travail. » Art. L.6313-2 de l’avant-projet de loi présenté à la presse le 6 avril 2018.

Cette définition ne remet pas en cause les actions de formation déjà existantes, c’est-à-dire les Validations d’Acquisition de l’Expérience (VAE), les bilans de compétences et le permis de conduire, mais elle permet de favoriser des méthodes et moyens de formations innovantes tels que les formations autodirigées, les colloques, le social learning, les formations distancielles… ou encore de reconnaître l’émergence de nouveaux thèmes tels que les softskills ou encore l’entreprenariat, les méthodes agiles. Cela devrait contribuer au soutien du développement du marché de la formation et d’encourager la formation aux compétences du XXIème siècle.

 

Les réformes Formation, une transformation sociale et digitale : vers l’organisation apprenante

Le gouvernement, à travers ces réformes, présente une nouvelle vision de la formation : celle qui remet au cœur de nos organisations la montée en compétences comme soutien majeur pour maintenir les emplois et faire face à l’évolution rapide des métiers. Ces nouvelles mesures traduisent une volonté d’aller vers un développement plus souple, plus moderne, plus innovant, des supports et modalités de formation. C’est également la volonté de rendre le collaborateur acteur de sa formation et de son évolution professionnelle.

Ces changements traduisent l’engagement du gouvernement pour aider les entreprises à garantir l’employabilité des collaborateurs, grâce à l’accessibilité et prise en main facilitée pour le collaborateur de son Compte Personnel de Formation (CPF).

 

  Auteurs

Salomé BIDAUX – Consultante

 
  Hanh-Phuc PFAENDER BONVALET – Consultante

 

Pour plus d’informations, vous pouvez contacter :

Aurélie JAUNEAU –  Manager

aurélie.jauneau@wavestone.com

[1] Information citée dans plusieurs sources, étude de l’OCDE, articles dans « les Echos », « Le Figaro », « Stratégies »
[2] Rapport d’étude menée par le groupe DELL & l’institut pour le futur – « Future Workfore Study »
[3] Cotisations des entreprises = 1,68% pour les entreprises de plus de 11 salariés et 1,23% pour celles de moins de 11 salariés
[4] Exceptions : fonds mis à dispositions également pour les entreprises de plus de 50 salariés pour les apprentissages ou dispositions spécifiques
[5] Les Organismes Paritaires Collecteurs Agréés ont été créés en 2014 par les réformes formations du gouvernement sous le Président Hollande

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