L’économie de partage : rêve ou réalité ?

La 12e édition annuelle du Women’s Forum Global Meeting s’est tenue du 30 novembre au 2 décembre 2016 à Deauville, en France, et a accueilli plus de 1 250 délégués – femmes et hommes, scientifiques et décideurs, chefs d’entreprise et pionniers, originaires de plus de 70 pays. La thématique de cette rencontre était : « L’économie du partage est-elle synonyme d’un monde de partage ? »

Wavestone, partenaire de cette prochaine édition, a participé aux conférences et a animé des interventions. Aurélie Welti, manager People & Change, vous partage certains sujets abordés lors de  cette 12e édition du Women’s Forum Global Meeting au travers d’une série d’articles à découvrir chaque semaine.

Qu’est-ce que l’économie de partage et quels sont ses enjeux ?

Selon Benita Matofska (fondatrice de The People Who Share), l’économie de partage est un système économique et social basé sur des ressources physiques et humaines, une société basée sur le partage. Mais en réalité, il y a une grande confusion sur ce terme de partage, ou plutôt, il existe plusieurs types de partages : le collaboratif (travailler ensemble), la location, le prêt… C’est en réalité une économie hybride. Tout n’est pas forcément gratuit, mais ce qui est important est de partager de la valeur. Trois types de valeurs peuvent être partagées : des valeurs économiques, sociales et/ou environnementales.

Bien évidemment, le moteur principal est économique (essayer de gagner de l’argent ou de moins dépenser). Toutefois, seulement 28% de la population mondiale participe réellement à cette économie de partage. L’enjeu de ce nouveau business model est donc de nous aider à créer plus de valeurs et à mieux les partager. Ce n’est pas impossible ; nous sommes de plus en plus sensibles à vivre des expériences humaines. Nous recherchons des transactions traditionnelles basées sur d’autres valeurs ; on note un retour aux valeurs profondes et un réel désir de partager. Ce potentiel de partage est illimité. Notre responsabilité à tous est de faire en sorte que cela soit possible afin de bâtir un nouveau paradigme positif, une économie durable, connectée au réel et favorisant les échanges humains.

Le comportement des consommateurs change, les gens adorent ce nouveau modèle économique. Dr Giana Eckhardt, Professeur de Marketing au sein de l’Université Royal Holloway de Londres, préfère parler d’économie d’accessibilité plutôt que d’économie de partage, c’est-à-dire favoriser l’accès aux ressources. Cet accès se concrétisant par un échange social ou économique, comme Airbnb par exemple. Dans ce type d’échanges, tout repose sur la confiance, puisque ces échanges sont réalisés avec des étrangers (Uber, Blablacar, Zipcar…). Les gens créent une communauté de confiance (grâce aux notations en ligne, les contrats qui sont développés, …). Ainsi, de nouveaux liens se créent avec des étrangers (bien que nous ne connaissions pas toujours nos propres voisins, c’est un peu un paradoxe mais après tout pourquoi pas !). Autre élément important, tous ces échanges favorisent la flexibilité et la liberté : on peut utiliser un vélo, une voiture sans avoir besoin d’en posséder une (plus besoin de gérer l’entretien, de se garer…). Les services proposés sont plus réalistes, favorisant l’usage à la propriété, et adaptés à nos besoins.

Autre point intéressant dont nous fait part Monique Leroux, Présidente de l’Alliance coopérative internationale, ce système nous offre de nouvelles opportunités avec moins d’intermédiaires (les échanges sont dirigés directement vers les consommateurs finaux), plus d’innovation (comment apporter plus de valeurs, au plus près des consommateurs), plus de services (ce qui diminue le risque) et plus de technologies et de connexions (un accès immédiat, connecté au monde entier).  Un modèle où il nous faut trouver des solutions qui créent plus de valeurs et qui soient mieux partagées : c’est aussi ce qu’on appelle l’économie collaborative.

Face à ce nouveau système, il est compliqué pour les organisations traditionnelles de s’adapter, souvent moins flexibles, innovantes ou digitales. L’économie collaborative est de fait basée sur les femmes et les hommes, et non sur les organisations. Ce nouveau modèle, dont le Canada est assez proche, devrait être enseigné dans les écoles de commerce.

Comment réguler tous ces échanges ?

De nouvelles politiques doivent être pensées et mises en place afin de sécuriser les transactions entre les particuliers/entreprises. En effet, de nouveaux risques apparaissent ; les particuliers qui souhaitent prendre le volant avec Blablacar par exemple. Les assureurs, tel que nous l’explique M. Denis Duverne, Président du Conseil d’Administration d’AXA, doivent s’adapter et créer de nouvelles réponses/offres de services adéquates (l’assurance sur mesure ou sur demande). L’assurance entre pairs/particuliers doit permettre à de petites communautés de partager les mêmes intérêts et les facteurs de risques afin de leur garantir un maximum de sécurité.

C’est aussi ce qui permet à cette économie de créer davantage de confiance, facteur clé de succès de l’économie collaborative.

Et l’éthique dans tout ça ?

Petit bémol ou plutôt axe de progression : afin de faire en sorte que ces valeurs soient bien partagées, il serait intéressant, urgent et éthique de forcer certains acteurs prépondérants du marché à payer leurs impôts/taxes. Par exemple, Airbnb n’a payé que 69 168 € d’impôts en France sur les bénéfices des sociétés en 2015 pour un chiffre d’affaires estimé à 65 millions. Ce n’est évidemment pas un cas isolé ; la plupart des champions de la nouvelle économie se sont fait pour spécialité de déclarer le moins de revenu possible en France. Objectif non avoué : payer le minimum d’impôt sur les sociétés.

Les valeurs de l’économie collaborative sont prometteuses, mais nous restons une économie capitaliste avant tout. Pour rappel, Waze, application mobile de navigation GPS qui a la particularité de s’appuyer sur une cartographie élaborée par ses propres utilisateurs, l’une des plus grande communauté mondiale, a vendu son application à Google pour la somme de 966 millions de dollars, bien que Google ait dû payer 230 millions de dollars en impôts pour l’acquisition des droits de propriété. Dommage que les conducteurs qui ont participé à la réussite de Waze n’aient pas été remerciés…

Business is business… En même temps l’idée est géniale, il fallait y penser !

Vous avez trouvé cet article intéressant ? (Re)Lisez l’article sur L’économie collaborative : les femmes et les pays émergents de la semaine dernier, et retrouvez nous la semaine prochaine pour un nouvel épisode sur Les transports et l’économie collaborative, abordés lors de la 12ème édition du Women’s Forum for the Economy and Society tenue à Deauville fin 2016.

Le Women’s Forum for the Economy and Society, est une organisation internationale fondée en 2005, visant à renforcer la représentativité des femmes et une plus grande mixité hommes-femmes dans tous les organes de pouvoir de la société. Ils s’emploient également à mettre en exergue des projets qui favorisent l’entrepreneuriat des femmes, par l’éducation, par la parité dans l’entreprise et par une présence plus forte des femmes dans les médias. C’est aussi une occasion pour les participantes, et participants, de faire entendre leur voix et leurs visions de l’avenir, et de susciter des engagements.

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